lundi 25 octobre 2010

4 mois et demi, premier bilan.

phare vu depuis la rive asiatique d'Istanbul

Quatre mois et demi après notre départ le 14 Juin nous pouvons souffler et faire un premier bilan.
Nous sommes à Istanbul, nous entamons nos premières rencontres au Moyen Orient. Dès que nous quitterons la ville nous nous plongerons dans les enjeux géopolitique de cette région du monde. Début décembre nous auront gagné l'Inde. Nous resterons en immersion dans une petite entreprise, à Rajkot dans l'état du Gujarat, qui fabrique des fours solaires, éoliennes et autres systèmes pour les régions rurales dépourvues en sources énergetiques. Sans trop vous en dévoiler, je peux vous dire que de belles surprises nous attendent! Puis nous découvrirons des projets très diversifiés à travers le pays. Ensuite ce sera la Chine, ses projets titanesques, son milliard d'habitants en pleine croissance économique, ses inégalités. Le Japon aussi, peut-être. Peut-être car les vagabonds devront aussi boucler le budget! Et oui. Enfin, ce sera le retour, en trans-sibérien. Le temps de la mise en forme des idées, du tri des images, des intervıews, des photos.
Mais pour l'heure il y a déjà beaucoup à faire. Nous avons été bien occupé pendant ces quatre mois, environ 35 visites ou interviews; pour ceux qui ont bien suivi le blog, vous avez pu compter 10 pays traversés (Allemagne, Pays-Bas, Danemark, Suède, Norvège, Finlande, Russie, Ukraine, Roumanie, Bulgarie et maintenant la Turquie), nous avons parcouru environ 15 000 kilomètres en stop, 1 000 en train, beaucoup à pied et 3 en taxi!
Mais l'important ce sont les nombreuses réflexions qui ont pris place dans nos têtes et on espère dans les votres.

Dès le début du projet notre vision du monde de l'énergie s'est trouvée modifiée. Notre première visite à la centrale géothermique de Soultz sous forets en Alsace par exemple. A travers cette source que nous croyions sure nous avons appris qu'aucune source d'énergie est neutre sur l'environnement. La géothermie peut engendrer dans certains cas des séismes sensibles, des déchets radioactifs du à l'accumulation de radon. Les éoliennes nuiraient aux oiseaux migrateurs, nécessitent des centrales fossiles pour palier à leur intermittence, en l'état actuel des réseaux de distribution d'énergie. Les barrages hydrauliques de Norvège vident les rivières de leurs saumons et enferment les cascades magnifiques, dans des tuyaux. Les panneaux solaires actuels contiennent des métaux lourds. La biomasse prend du terrain sur l'agriculture nourrissière, et la part provenant des déchets d'autres de nos activités suffirait elle ? Les énergies fossiles et nucléaires présentent des nuisances réelles et potentielles qu'il n'est plus nécessaire de citer. Le débat est aussi culturel et les solutions différentes dans chaques localités en utilisant des sources différentes au sein de ce panels de sources énergétiqes. La clef c'est la diversité.
les chutes d'eau en Norvège ou les barrages?

Si on ne veut avoir aucun impact, il ne faut pas consommer...
Ce qui est sûr c'est que le nucléaire comme les énergies fossiles sont des ressources limités. Et que de toute manière il faudra les remplacer un jour. Pourquoi pas maintenant puisqu'ils représentent potentiellement un risque pour notre intégrité?
Certains avancent que les choses sont bien faites et que ce laps de temps correspond au temps nécessaire pour développer les sources du futur...

En attendant certaines choses paraissent déjà comme évidente. Durant notre parcours nous avons pris conscience du gâchi réalisé dans certains secteurs comme la chaleur. La mise en place de réseau de chaleur urbain permettent de récupérer la chaleur de nombreuses sources pour lesquelles la chaleur est un déchet. Dans « l'écosystème » industriel de Kalundborg la chaleur issue du refroidissement de la raffinerie sert ensuite à la centrale électrique au charbon puis sert de source pour le fabricant de placo. La même chose serait possible aussi entre une centrale biomasse comme celle que nous avons visité à Baden Baden en Allemagne et une autre quelconque industrie. De plus la mise en place de ces réseaux de chaleur permet de raccorder d'autres sources plus innatendues. A Helsinki le circuit de refroidissement des serveurs informatiques sont raccordés au réseau de chauffage. En procédant ainsi, on économise d'autant la quantité d'électricité ou d'énergie fossile nécessaire pour nous chauffer (et celle nécessaire pour refroidir les serveurs).
les réseaux de chaleur à Kalundborg

Il y a un point que nous voulons encore creusé mais où il apparaît qu'il y a beaucoup de chose à faire, ce sont les réseaux de distribution électrique. Comme nous l'expliquait, dans son bureau de l'université d'Helsinki, Peter Lund si la production d'énergie propre est souvent intermittente, notre consommation l'est aussi. Il est possible d'imaginer un réseau capable de communiquer avec les appareils liés à nos différentes activités pour commander leur fonctionnement au moment où l'énergie est disponible. Il est possible d'organiser des tours de rôle entre les différents foyers sans que les ménages s'en aperçoivent. Il est aussi possible de changer certaines habitudes, faire les machines à laver quand il y a du vent si on est alimenté par une éolienne...
les réseaux électriques à repenser (Bucarest)

Ce dont nous avons beaucoup discuté est le fait que l'intégration massive d'énergie propre et renouvelable ne pourra se faire que par une adaptation profonde du réseau de distribution d'énergie.
Actuellement les réseaux sont centralisés et vont d'un pôle de production vers une myriades de points de consommation. Avec les énergies renouvelables la production est parsemée sur le territoire et donc à travers le réseau. Ce n'est donc pas la même configuration. Et avec un réseau intelligent il faut prévoir des centres nerveux capables d'optimiser et de faire communiquer les points de production et les points de consommation.
Cela dépend de l'infrastructure des pays mais en France comme en Finlande la saturation en énergie renouvelable serait autour de 20% du fait de la configuration du réseau actuel. Au Danemark ce serait plutôt 30%. Quoi qu'il en soit pour aller vers une nouvelle ère énergétique les réseaux doivent être repensés et reconstruit.
Reste à savoir la manière dont il faut procéder, mais c'est une piste intéressante qui semble donner une certaine cohérence à différents projets sur les énergies alternatives que nous avons pu visiter. Que ce soit dans l'écovillage de Sieben Linden en Allemagne où 70% de l'énergie est locale, à l'écoquartier de Malmö en Suède où l'énergie est 100% locale et renouvelable, ou bien encore sur l'île de Samso au Danemark qui produit en moyene plus d'énergie qu'elle n'en consomme, la transition énergétique s'est faite par une volonté locale. Comme nous l'as expliqué, à Samso, le prix Nobel de l'Environnement Soren Hermansen, il est plus facile d'opérer la transition territoire par territoire. Son île image bien ce principe, mais rien n'empêche d'opérer ville par ville et quartier par quartier.
C'est un principe qui cohérent avec la réorganisation du réseau à des niveaux plus locales.

produire l'énergie en utilisant les ressources de chaque région (Samso)

Reste à savoir si les intermittences de production peut être pallier avec des échanges d'énergies entre les différentes localités, peut être aussi avec des changement de consommation, ou si nous auront toujours besoin de centrale d'appoint pour assurer la robustesse du réseau dans son ensemble.

Plus récemment nous avons traversés des pays de l'Est de l'Europe, puis des pays Européens; la Bulagarie, la Roumanie. Parfois les priorités sont différentes. Comme nous l'expliquait avant hier à l'ITU(Istanbul Technıcal University) le Professeur Abdurrahman Satman (Department of Petroleum and Natural Gas), la Turquie a en premier lieu besoin d'énergie. Quand elle maitrisera son énergie elle pourra se soucier de son impact. Et c'est pour cela qu'il travaille notamment sur des réserves de pétrole et de gaz supposées importantes en Mer Noire. En effet la Turquie importante une grande part de son énergie, ce qui la rend dépendante notamment de la Russie pour le gaz. On connait l'importance de l'indépendance énergétique dans la situation géopolitique d'un pays. Hilal Atici de Greenpeace Turquie dément que ces ambitions dans le pétrole ou dans le nucléaire soient dans le but de parvenir l'indépendance énergétique. La plupart du temps que ce soit pour le nucléaire ou le pétrole ce sont des grands groupes étrangers qui construisent et exploitent les centrales sur le sol turc et vendent ensuite l'énergie au pays. Notre derniere visite en Bulgarie en était un exemple.

Quoi qu'il en soit nous serons confrontés à cette question de la dépendance énergétique et de l'accès à l'énergie jusqu'en Chine. Et à la question: pourquoi ferions nous des efforts en Europe pour diminuer notre impact alors que le même effort en Chine aurait une efficacité plus grande? On comprend que le but n'est pas la surenchère, que les priorités ne sont pas les mêmes et que si on aimerait voir nos voisins minimiser leur impact il faudrait leur faciliter la tache. Ne pas demander aux autres de répondre à nos problématiques, d'abord leur permettre de répondre aux leurs (l'accès à l'énergie).
Et comme la planète n'est pas assez grande pour que tous consomment comme nous le faisons, nos efforts en la matière sont aussi primordiaux chez nous qu'ailleurs.

Nous devons mettre en suspent ces réflexions, en espérant que la suite du projet continuera de les alimenter. Nous ajoutons cette sage citation:

"... le véritable objectif devrait être en permanence de progresser, d'être meilleur que soi-même et non meilleur que les autres"
Albert JACQUARD


Vous pouvez retrouvez une partie de ces réflexions dans la revue S!lence de ce mois.

D'ailleurs nous souhaitons la bienvenue aux lecteurs de S!lence et du journal Métro!

4 commentaires:

  1. 4mois 1/2 déjà :-( snif tu me manques!!!!!
    éclatez vous encore et toujours !!!
    Marie la rousse

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  2. et oui à moi aussi il manque, mais le plus important est comme le dit Marie qu'ils s'éclatent et profitent . Encore de belles photos Al'occasion les garçons une petite vidéo dont vous avez le secret avec musique...
    Bises.
    Mum

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  3. Oui les garçons une petite vidéo, ça serait super!!!!!
    Mon frère tu me manques aussi...
    Profitez! Profitez! C'est un super voyage!
    Je suis toujours aussi fan de votre périples.

    Gros bisous

    Lucie, Cédric et Voyoute

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  4. C'est un article fabuleux. Cela remet bien tout en question et est totalement d'actualité.
    La question de la refonte du système de distribution de l'électricité est très intéressante! merci pour l'info.
    ENFIN: "On comprend que le but n'est pas la surenchère"
    wouaw, vraiment cet article est parfait.
    bises

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